Depuis plus de 150 ans, le nom de Philip Morris, le leader mondial de l’industrie du tabac, est étroitement associé à la cigarette. Face aux évolutions de la société, et aux preuves scientifiques incontestables de la nocivité de la fumée, Philip Morris International (PMI) opère depuis 5 ans une mue inédite dans l’histoire industrielle, en visant l’arrêt à moyen-terme de la commercialisation de la cigarette et le basculement de son modèle économique vers les alternatives à la cigarette et les solutions médicales d’accompagnement aux fumeurs souhaitant arrêter.

Transformation positive ou stratégie cynique de communication ? Les avis divergent sur ce point et la question divisent depuis plusieurs jours les actionnaires du groupe Vectura, spécialisé dans les produits médicaux inhalés, qui ont deux semaines pour répondre à l’offre d’acquisition financièrement très avantageuse (une offre par action supérieure à 30% de son cours, qui valorise la société à 1,3 milliard de dollars) que vient de faire PMI, désireux de se positionner dans les secteurs de la santé et du bien-être pour préparer l’après-cigarette.

Les activistes anti-tabac sont évidemment vent debout contre cette acquisition, mais de nombreux investisseurs institutionnels pourraient se laisser convaincre en raison bien sûr de l’attractivité de l’offre, mais également en partant du principe que le meilleur moyen de venir à bout du fléau du tabagisme, serait d’embarquer à bord une fois pour toute les cigarettiers eux-mêmes. Et tant pis s’il y a du cynisme dans leur positionnement actuel, et s’ils ont tout tenté pendant des décennies pour minimiser la dangerosité de la cigarette.

La réalité est d’ailleurs plus contrastée que cette vision manichéenne. Oui, l’industrie du tabac a longtemps résisté à l’évidence scientifique de la nocivité de ses produits, oui elle est responsable de millions de morts à travers le monde, mais les industriels du secteur (et en particulier PMI), travaillent depuis plusieurs décennies à préparer l’après-cigarette et à initier une véritable révolution copernicienne de leurs modèles économiques. En investissant notamment massivement dans des solutions technologiques alternatives à la cigarette (comme le dispositif de tabac à chauffer Iqos pour PMI).

Résultat. L’évolution de la structure des revenus du groupe PMI au cours des cinq dernières années a évolué drastiquement avec un revenu net des produits non combustibles qui est passée de 0% à 25% depuis 2016. Le nouveau PDG du groupe, Jacek Olczak, a annoncé le mois dernier qu’il souhaitait encore accélérer la dynamique de transformation du groupe et ambitionnait d’atteindre plus de 50% des revenus nets mondiaux du groupe avec des produits non combustibles d’ici 2030 et 100% d’ici 2050. M. Olczak a par ailleurs indiqué que PMI comptait arrêter la commercialisation de cigarettes dans certains marchés comme la Grande-Bretagne et le Japon d’ici 2030.

Ne soyons pas naïfs. Les cigarettiers ne sont pas devenus des superhéros du jour au lendemain, mais il faut néanmoins leur reconnaitre une volonté réelle (sans doute contrainte par la réalité des choses) à accompagner et à accélérer la mutation vers une société sans fumée. Malgré des états de service qui ne parlent franchement pas pour eux, ils peuvent être aujourd’hui des alliés incontournables et puissants dans la lutte contre le tabagisme. Ils ont la connaissance du marché et la puissance financière pour faire une profonde différence.

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